SNSM Saint Cast le Guildo; clin d'oeil maritime

Petit clin d’oeil mari­time pour un premier avril à la maison (restez chez vous!). De nouvelles pers­pec­tives pour tous ceux qui font le quart de zéro à quatre…

Sablier de marine

A l’heure du GPS et de la carte élec­tro­nique, la déter­mi­na­tion de la posi­tion du navire est deve­nue instan­ta­née. En 1980, il n’y a fina­le­ment pas si long­temps, l’on usait encore du sextant et des tables de navi­ga­tion. Connaître l’heure avec préci­sion était indis­pen­sable au point qu’un offi­cier était chargé à bord des bateaux de la marine marchande ou de la marine natio­nale de la tenue du « cahier de marche des montres » où l’on notait chaque jour l’avance ou le retard des chro­no­mètres du bord après avoir pris un top à la radio.


Du temps du corsaire malouin Duguay Trouin, alors au large du Spitz­berg à la chasse aux marchands hollan­dais, l’heure repo­sait sur du sable et je l’es­père de bon chro­no­mètres.


« Les brumes sont si fréquentes dans ces parages qu’elles nous firent tomber dans une erreur fort singu­lière. On se sert dans nos vais­seaux d’hor­loges de sable d’une demi-heure que les timo­niers ont soin de tour­ner huit fois pour marquer chaque quart, qui est de quatre heures au bout duquel l’équi­page se relève. Or il est assez ordi­naire que les timo­niers pour abré­ger leur quart tournent cette horloge avant qu’elle ne soit toute écou­lée (cela s’ap­pelle manger du sable). Cette erreur ou plutôt cette malice ne se peut redres­ser qu’en prenant hauteur au soleil, et comme nous le perdîmes de vue pendant neuf jours consé­cu­tifs, par une brume conti­nuelle, que d’ailleurs dans la saison et la lati­tude où nous étions, le soleil ne fait que tour­ner autour de l’ho­ri­zon, ce qui rend les jours et les nuits égale­ment claires, il arriva que les timo­niers, à force de manger du sable, parvinrent au bout de huit jours, à faire du jour la nuit et de la nuit le jour, si bien que tous les vais­seaux de l’es­cadre, sans excep­tion, trou­vèrent au moins dix à onze heures d’er­reur avant que le soleil ne réap­pa­rut. Cela avait telle­ment dérangé les heures de repas et du sommeil, qu’en géné­ral nous avions tous envie de manger quand il fallait dormir, et de dormir quand il était ques­tion de manger ; mais nous n’y fîmes atten­tion qu’après avoir été désa­bu­sés en prenant hauteur. »